Exposition Kafka à la Bibliothèque Nationale
Tout le monde a entendu parler de Franz Kafka, ce grand écrivain austro-hongrois de langue allemande, né à Prague en 1883 et décédé à Kierling, à côté de Vienne, en 1924, il y a exactement 100 ans. A cette occasion, plusieurs bibliothèques et musées à travers le monde, lui ont récemment consacré des expositions. La Bibliothèque Nationale d’Israël, ne fait pas exception. En effet, du 4 décembre 2024 au 30 juin 2025, une exposition intitulée « Kafka, métamorphose d’un auteur » accueille le public pour découvrir ou redécouvrir la vie, l’oeuvre et l’influence de ce grand écrivain.
Il faut dire que depuis 2019, la Bibliothèque Nationale d’Israël a récupéré une partie des archives de Franz Kafka. Et c’est ainsi que l’on peut admirer dans cette exposition près de 80 objets – lettres, dessins, manuscrits etc… – originaux. Pour la petite histoire, avant sa mort Franz Kafka avait demandé à son ami Max Brod de récupérer tous ces écrits et de les brûler. Si ce dernier a effectivement cherché et récupéré une grande partie des écrits de Kafka après sa mort, il n’a pas respecté la deuxième partie de la demande, puisqu’au lieu de les brûler, il a fait publier 3 romans dans les années 1930. Et quand Max Brod, fuit à son tour l’Europe en 1939 par le dernier train qui quitte Prague avant l’invasion allemande, direction la Palestine, il emporte dans ses valises, une bonne partie des archives de Kafka. On trouve également des archives à l’Université d’Oxford et en Allemagne aux archives de la ville de Marbach.
L’exposition se déploie sur 3 espaces : 2 salles et une petite pièce qui les sépare.
Dans la première partie de l’exposition, on suit la vie et l’oeuvre de Franz Kafka. l’exposition a été conçue de façon originale comme un labyrinthe pour refléter la pensée, parfois confuse et absurde de l’auteur. A chacun de choisir la route qu’il veut emprunter pour découvrir : sa famille et ses amis, son oeuvre et son rapport au judaïsme.
C’est dans cette première salle que l’on peut voir des photos de Kafka, de sa famille et de ses amis. On peut aussi y découvrir certains de ses dessins. Il faut savoir qu’avant de se mettre à l’écriture, l’écrivain dessinait ceux qui deviendraient plus tard les personnages de ses romans.
On découvre aussi quelques pages de « La lettre à mon père ». Il s’agit d’une lettre de plus de 100 pages, que Kafka écrit à son père après que celui-ci lui ait interdit d’épouser sa fiancée. Il est très en colère et met sur papier tout ce qu’il reproche à ce père. Mais il n’envoie jamais la lettre. Par contre, il en tape une copie, mais incomplète, dont il manque les dernières pages. La petite histoire anecdotique est que la copie incomplète fait partie des archives que possède la Bibliothèque Nationale d’Israël, la lettre originale étant dans les archives en Allemagne. Mais en fait, au moment de la répartition des archives, Max Brod se rend compte que la copie destinée à Israël est incomplète et il y ajoute les dernières pages provenant de la lettre originale. De ce fait, la lettre originale se retrouve incomplète en Allemagne. Et c’est une de ces dernières pages originales qui est exposée en Israël. Ces tribulations auraient sans doute plu à Kafka….
Une partie de l’exposition est consacrée à la relation de Kafka et du judaïsme. Dans la famille, seules les grand-mères gardent les traditions juives. Kafka fréquente la synagogue aux grandes fêtes et ne s’intéresse pas au judaisme plus que ça. Par contre, il a différents amis juifs qui eux font partie d’organisations et sont plus actifs. Il fréquente donc ce milieu, sans s’y identifier vraiment. Bien que dans ses écrits, il n’y ait pas de personnages juifs, ni de relation avec le judaîsme, certains commentateurs de Kafka trouvent néanmoins son oeuvre juive, voir cabalistique. Par contre, Kafka, contrairement à beaucoup de ses amis juifs, décide d’apprendre l’hébreu à partir de 1917. Un de ses cahiers fait partie de l’exposition. Il avait émis le souhait de se rendre en Palestine vers la fin de sa vie, mais son état physique – il est affaibli par la tuberculose – ne lui permet pas de faire le déplacement.
A la sortie de cette première salle, on passe devant une petite pièce plongée dans une certaine obscurité, avec des poufs et des écouteurs. On peut y entendre, en 4 langues – allemand, hébreu, anglais et arabe – des extraits de textes de Kafka. C’est une bonne transition et une petite pause avant de plonger dans la deuxième salle de l’exposition.
Dans cette deuxième salle, on aborde l’impact de Kafka sur les arts – la littérature, la musique, le théâtre, la danse etc… – à travers le monde et plus spécifiquement en Israël. En effet, l’écrivain a marqué de nombreux artistes et continue à le faire. Cette partie, qui se présente sous la forme de grands murs penchés, comme ceux d’un château – illusion à un de ses romans – veut également montrer qui était vraiment Kafka et comment son oeuvre est, contrairement à ce que beaucoup pensent, accessible à tous.
Ce qui est intéressant, c’est que pour cette partie, la Bibliothèque Nationale d’Israël a fait appel à des artistes modernes pour refléter leur vision sur Kafka. Huit illustrateurs ont eu accès aux archives et notamment aux photos et aux dessins de l’écrivain, pour pouvoir à leur tour créer une oeuvre, une illustration, de leur représentation de Kafka. Michel Kichka, célèbre illustrateur belgo-israélien a par exemple dessiné 100 portraits/caricatures de Kafka pour marquer les 100 ans de sa mort.
Une autre oeuvre originale est une vidéo de quelques minutes en 4 langues – allemand, hébreu, anglais et arabe – du texte intégral de la brève nouvelle de Kafka » Devant la Loi ». Il s’agit d’une sentinelle qui garde la porte de la loi et qui empêche un homme d’y entrer, en lui disant que ce n’est pas le moment. Malgré son insistance, l’homme reste à l’extérieur toute sa vie. Avant de mourir il s’étonne de n’avoir pas vu d’autres personnes intéressées par entrer. C’est alors que la sentinelle lui révèle que cette porte ne lui était réservée qu’à lui et que maintenant il est trop tard et qu’il s’en va en fermant la porte…. Typiquement kafkaien comme situation. A noter que ceux qui racontent cette histoire ne sont pas de vrais acteurs mais des employés de la Bibliothèques Nationale parlant une des quatre langues.
Bref, il y a beaucoup de choses à découvrir dans cette exposition consacrée à Kafka. Je ne sais pas si vous aurez la même sensation que moi en sortant, mais j’ai eu envie de relire certaines de ses oeuvres. Et j’ai déjà relu « La métamorphose » que j’ai bien reaimé.
Pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer – mais si vous pouvez, je vous le recommande – il existe une « exposition virtuelle » qui reprend certains des éléments visibles sur place.
Plus d’infos : Kafka: Metamorphosis of an Author | Exhibitions in the National Library
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