dressed for eternity

"Habillé pour l'éternité" la nouvelle expo du Musée d'Israël

Le Musée d’Israël présente une nouvelle exposition intitulée « Habillé pour l’éternité ». Elle aborde un sujet difficile, mais intéressant, celui de la mort, à travers les habits funéraires dans la tradition juive.

J’ai eu la chance de la visiter avec sa curatrice, Efrat Assaf-Shapira, qui est la responsable du secteur textile et costume du musée. Il faut savoir que le Musée d’Israël compte une très large collection de vêtements portés par les Juifs à travers le monde et les époques – principalement les 18ème, 19ème et 20ème siècles. Mais c’est la première fois qu’une exposition sur les vêtements funéraires est montée. En effet, il n’est pas vraiment logique de pouvoir exposer des vêtements qui doivent accompagner leur propriétaire, mort, dans la tombe. Mais il faut savoir qu’en Israël, la Hevra Kadisha, l’organisme qui s’occupe des enterrements, fourniT les habits funéraires. Ce qui explique que différentes personnes ont fait don de ceux qu’ils avaient apportés avec eux lors de leur alyah.

Dans la tradition juive, on dit souvent que prendre soin des morts est la mitsva, la « bonne action », par excellence. En effet, c’est une mitsva pour laquelle on ne reçoit jamais de remerciement du principal bénéficiaire…. Il faut savoir que jusqu’à aujourd’hui toutes les Havra Kadisha sont composées uniquement de volontaires. Il en existe 13 à Jérusalem.

Il fut un temps où les personnes riches étaient enterrées dans leurs plus beaux habits. Mais alors les pauvres, qui n’avaient rien, se sentaient souvent mal pour leurs morts. Au 1er siècle de notre ère, Rabban Gamaliel, une des autorités du Sanhédrine, demanda à être enterré dans de simples habits de lin. Et depuis, tout un chacun est enterré dans le même habit.

La cape d’un kittel alsacien

Les vêtements funéraires se composent, suivant les époques et les traditions, de 9 à 13 pièces différentes. Ils sont généralement simples – blancs en lin, comme ceux du grand prêtre du Temple – et suivent les modes vestimentaires de la région et de l’époque. Les morts sont habillés de bas en haut et de droite à gauche, comme s’habillait le grand prêtre. Pour Efrat Assaf-Shapira, l’étude de ces vêtements est très intéressante car elle permet de mieux connaitre la mode des différentes époques. En effet il faut savoir qu’il reste très peu de robes ou de costumes provenant d’avant le 18ème ou 19ème siècles. Mais les vêtements funéraires permettent d’en savoir plus sur la mode de ces époques, puisqu’ils reprennent des éléments des vêtements de tous les jours ou de cérémonies. C’est ainsi que sur les habits funéraires provenant d’Alsace on retrouve une genre de cape portée par le clergé de l’époque et qui rappellerait plus lointainement la fraise, ce col plissé, des costumes du 16ème siècle.

 

Dans presque toutes les traditions, il est coutume de porter un ou plusieurs éléments du vêtement funéraire de son vivant : lors d’une naissance ou d’un mariage. On le voit encore dans certaines communautés qui mettent un habit spécial – en Alsace appelé le Kittel – le jour de Yom Kippour ou du mariage. 

Les vêtements funéraires de Zivia Kay

Une artiste israélienne, Zivia Kay, fabrique des vêtements funéraires. Ils se composent d’éléments à mettre dans sa vie quotidienne – comme une veste à capuche – et d’autres qui seront réservés au jour de son départ. Au fur et à mesure du déroulement de la vie, elle intègre dans les pièces existantes ou dans de nouvelles des éléments qui rappellent un épisode de la vie du futur défunt. Il faut savoir que dans certaines traditions, comme en Inde par exemple, il est coutume, au dessus des vêtements funéraires, de rajouter un élément personnel comme un sari.

Il est également intéressant de savoir qu’il existe bien sûr des traditions ashkenazes et d’autres sefarades, mais que certaines se mélangent. Par exemple, la Hevra Kadisha Yerushalmit, fondée au début du 19ème siècle par les élèves du Gaon de Vilna, a adopté les vêtements funéraires séfarades espagnols qu’ils ont trouvés en arrivant à Jérusalem.

Hevra Kadisha Yerushalmit

Enfin pour finir, une tradition que j’ai été à la fois surprise et contente de retrouver dans la présentation d’Efrat Assaf-Shapira et qui est celle des Juifs alsaciens que j’ai moi même vécue il y a de cela quelques années lors de l’enterrement de ma mère. En effet, on fait participer les proches – notamment les enfants – ( sans forcément les prévenir à l’avance d’ailleurs) à l’habillage du mort en leur demandant de lui mettre un chausson. Sans aucun doute une grande mitsva … mais aussi un beau traumatisme…

Enfin, vous en apprendrez plus dans cette petite mais intéressante exposition que je vous conseille de voir lors de votre prochaine visite au Musée d’Israël.



texte et photos : Valérie Cudkowicz

 

 

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