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"L'école de Jérusalem" : l'oeil des artistes sur la ville

Je vous ai déjà parlé de la nouvelle entrée du musée de la Tour de David, le pavillon Angélina Drahi, qui accueille la billeterie du musée, les bureaux des programmes éducatifs et une salle pour les expositions temporaires, que le musée propose désormais.   En effet, si la Tour de David raconte – et maintenant d’une façon très ludique et technologique – l’histoire de Jérusalem, le musée se veut également un pont entre la Vieille Ville et la ville moderne, entre l’Est et l’Ouest et pas uniquement à travers ses collections archéologiques mais aussi à travers l’art.

C’est pourquoi, la première exposition temporaire, qui a ouvert ses portes le 7 mars 2023, s’appelle « L’Ecole de Jérusalem ». Existe-il une « Ecole de Jérusalem  » dans l’art? Peut-on définir un art de Jérusalem, comme il existe l’Ecole de Paris par exemple? Il faut se souvenir qu’il y a exactement 100 ans, les autorités du mandat Britanique, créèrent le pavillon de la Tour de David pour en faire le premier lieu d’exposition artistique du pays.

L’exposition « L’Ecole de Jérusalem », se déploie donc en deux périodes et deux endroits pour exposer l’évolution de l’art et de la représentation de Jérusalem sur les cent dernières années. La première exposition, « L’esprit de la pierre » se tient au musée de la Tour de David et présente des artistes du début du 20ème siècle aux années 1950. La seconde exposition,  » Zone abandonnée » se trouve à HaMiffal et présente des oeuvres d’artistes plus modernes, des années 1950 à nos jours. 

« L’esprit de la pierre » au musée de la Tour de David

Cette exposition permet de suivre l’évolution de l’art dans la première moitié du 20ème siècle, de la création de l’Ecole Bezalel à la déclaration de l’Etat d’Israël. Il faut savoir que l’Ecole Bezalel a été nommée ainsi en référence au personnage dont on parle dans la paracha de Vayakhel – justement celle de la date de l’inauguration de l’exposition – Bezalel qui est le symbole des artistes dans le judaïsme. Mais en hébreu « Bezal El » veut aussi dire « à l’ombre de D. ». Et comme le dit le Rav Jonathan Sacks dans so commentaire de Vayakhel, « l’art ajoute de l’émerveillement à la foi ».

A travers des vidéos, des tableaux et des objets, on peut retracer la vision de Jérusalem qu’ont eu les artistes, montés dès la 1ère alyah. Ce qui est intéressant à noter est l’évolution de la représentation de la ville dans leurs oeuvres. Au début Israël et Jérusalem sont représentés à travers certains de leurs symboles : le chandelier à six branches ou les lieux saints. Puis la vision s’élargit aux paysages et aux personnages. Les artistes venus d’Europe apportent avec eux, les techniques apprises en Europe comme le figuratisme, l’expressionnisme et l’avant-gardisme. Mais ces artistes rencontrent aussi « l’orient » et notamment une nouvelle lumière qui se reflète dans certains tableaux. L’art à cette époque évoque une identité à la fois israélienne et juive.

L’exposition présente des oeuvres d’artistes connus – Boris Schatz, Abel Pann, Reuven Rubin, Anna Ticho etc… – et des artistes moins connus. Il est intéressant de noter, comme le dit la curatrice Tal Kobo, que nombre d’oeuvres exposées ont été prêtées par les descendants de ces artistes. 

Différentes vidéos montrent la vie dans la Vieille Ville au début du 20ème siècle, des enfants travaillant dans les ateliers de menuiserie ou de tissage de l’Ecole Bezalel ou encore des artistes en plein travail créatif.  

Une partie de l’exposition est aussi consacrée à l’écriture et notamment à plusieurs travaux d’artistes de l’Ecole Bezalel et dont ceux de l’architecte Yerachmiel Schechter, qui est à l’origine du département typographique de l’école. 

 

Cela s’accorde avec le titre de l’exposition « L’esprit de la pierre » – qui est d’ailleurs celui d’une oeuvre de Leopold Krakauer exposée sur un des murs – qui parle d’un parcours de l’esprit au concret, des lieux aux mots.

 
« Zone abandonnée » à HaMiffal

Pour aller voir la deuxième partie de l’exposition, il faut traverser la Mamilla, dans laquelle aussi des oeuvres d’art contemporaines sont exposées. 

Je vous ai déjà parlé de ce lieu, créé il y a quelques années dans un bâtiment du 19ème siècle, à quelques pas de l’hôtel Waldorf Astoria et du Centre Mondial du Judaïsme Nord Africain. Là se côtoient des artistes qui s’expriment sur les murs et dans le jardin. Ici on peut à la fois admirer des oeuvres et apprendre à en créer.   

Dans cette exposition, sont présentées les oeuvres d’artistes plus contemporains, à partir des années 1960 à nos jours. Et l’ambiance est complètement différente. J’avoue avoir un peu plus de mal avec l’art moderne, mais c’est à chacun de se faire son opinion sur les oeuvres exposées.  

Par contre ce qui est intéressant, est la réponse donnée par le curateur de cette exposition – le Dr Elad Yaron – à la question de savoir s’il existe une « Ecole de Jérusalem »? Pour lui la réponse est sans doute oui, bien que la réflexion et les recherches à ce sujet se poursuivent. Cette « Ecole de Jérusalem » résulterait de plusieurs facteurs qui la différencient des autres courants artistiques : 
* à Jérusalem, beaucoup d’oeuvres sont le fait de groupes d’artistes qui travaillent en « shoutafout » comme dans l’étude de la torah
* à Jérusalem, les oeuvres dégagent un sentiment politique plus visible qu’ailleurs
* à Jérusalem, le mélange de populations se retrouve dans une création artistique plus riche et variée
* à Jérusalem, on crée beaucoup sur le lieu même qui prend différentes significations suivant les artistes
* à Jérusalem, les artistes ne s’expriment pas uniquement à travers des objets mais aussi à travers des « performances », des spectacles éphémères

Et tout cela donne une palette d’oeuvres complètement différentes de celles « plus classiques » de l’exposition de la Tour de David. Ici on peut plus parler d’installation que de tableau. Une partie de l’exposition tourne autour des « souvenirs » de Jérusalem avec des objets aussi variés qu’une kippa avec un numéro de téléphone à appeler mais pas chabat, un casque sur lequel est écrit « press » et qui est percé d’un trou de balle etc….Il est souvent plus difficile de comprendre le message de l’oeuvre que devant des tableaux « plus classiques ».

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